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Techniques animées

Capture d'écran de Golden BoyLorsque l'animation japonaise se lance à la conquête du marché de la télévision en 1963 avec la série Astro Boy (Tetsuwan Atom), le marché est réduit et les coûts de production sont certains de très vite grimper en flèche si l'on applique à cette production les mêmes standards que pour les longs métrages, inspirés du modèle américain. Pour répondre aux exigences budgétaires limitées et aux impératifs de production (20 minutes effectives de DA par semaine), TEZUKA Osamu, le créateur de la série, décide de passer du modèle d'animation fluide à l'occidentale (soit 12 à 16 im./sec. en moyenne) à un modèle nettement moins fluide qui se contente de seulement 2 à 4 im./sec. Ce manque de fluidité sera pendant longtemps le premier reproche fait à l'animation nippone, lorsqu'elle envahira les écrans de télévision en Occident à la fin des années 70 et au début des années 80 et par la suite.

Seulement TEZUKA et bien d'autres après lui ont compris que le dessin animé ne relevant pas des mêmes processus d'identification que dans le cinéma en prise de vues réelles, la fluidité de l'animation n'est pas forcément un facteur déterminant pour accrocher le spectateur. Tout l'enjeu dans la création nippone d'animation va être de replacer l'attention du spectateur sur ce qu'il est important de suivre à l'écran. Bien entendu, cette logique de restriction dans la fluidité d'animation, et les techniques propres au DAN qui en découleront, s'appliqueront plus sur les productions télévisées que sur les films de longs métrages, avec la présence en intermédiaire des OAVs. Mais ces techniques, élaborées très tôt dans l'histoire de l'animation japonaise moderne, continuent d'être employées encore aujourd'hui, malgré le gain considérable de temps que l'outil informatique, entre autres, a pu faire gagner aux animateurs.

Toutes ces techniques font que l'animation japonaise a su développer une forme qui lui est spécifique, bien au-delà des questions d'esthétisme lié à la parenté avec le manga ou d'autres formes artistiques nippones liées au dessin, qui ont, elles aussi, leur rôle à jouer. Mais ces formes spécifiques hérités des techniques historiques du DAN ont façonné petit à petit la narration de l'animation japonaise et ont eu, peut-être, comme première conséquence de privilégier une forme de découpage qui limite au maximum les enchaînements d'animation pure, du moins dans la production télévisée et les OAVs, mais aussi sur quelques longs métrages. Elles créent des moments de tension intenses lorsqu'elles s'enchaînent avec des scènes d'action au rythme d'animation soutenu. L'enjeu se situe certainement là. De par une exigence de production (garder le budget pour les séquences dites « d'action », en minimisant son usage lors d'autres séquences), s'est progressivement formée une exigence esthétique : jouer constamment sur l'opposition des émotions fournies aux spectateurs et créer ainsi une attente, une tension, un jeu des opposés et une explosion d'images en mouvements à partir d'une succession de plans préalables riches en caractéristiques mais tout en immobilisme.